Un pédiatre berruyer jugé pour escroquerie à grande échelle

Les faits reprochés à Hussein El Moussaoui, pédiatre à Bourges, sont lourds : selon le dossier d'instruction, il aurait détourné près de 1,3 million d'euros, dont 1,241 million au détriment de la Caisse primaire d'assurance-maladie du Cher, entre 2016 et 2020. L'affaire a éclaté lorsque des patients ont relevé des anomalies dans leur facturation et les ont signalées.
Après quatre ans d'enquête, le praticien a comparu mercredi devant le tribunal correctionnel de Bourges. Courtois à la barre, il a tenté de justifier les paiements indus, les actes fictifs et les actes surnuméraires qui lui sont reprochés. Mais pour le substitut du procureur, l'affaire ne fait aucun doute : "C'est une escroquerie organisée par une surfacturation intense à des fins d'enrichissement personnel." Un point fermement contesté par la défense, qui reconnaît un non-respect de la nomenclature mais dément toute intention frauduleuse.
Les faits mis en lumière par l'enquête sont accablants : facturation de consultations pour des enfants absents, décompte de toute une fratrie alors qu'un seul enfant était reçu, ou encore vingt-cinq tests de surdité fictifs au sein d'une même famille. Une enquête menée auprès de cinquante patients a confirmé ces irrégularités.
Arrêté en juin 2020 et mis en examen le mois suivant, l'homme a été incarcéré en mars 2021 à la maison d'arrêt de Nevers pour ne pas avoir réglé sa caution de 400.000 euros. Il a été libéré deux mois plus tard. En octobre 2022, la chambre disciplinaire nationale de l'Ordre des médecins lui a retiré son droit d'exercer, décision confirmée en janvier dernier par le Conseil d'Etat.
A la barre, le pédiatre tente de minimiser les faits : "Je ne connaissais pas les règles, j'avais des problèmes avec le logiciel de facturation." Un argument balayé par les avocats des parties civiles : "Ce ne sont pas des erreurs ! Un professionnel sait que les tests de surdité doivent être réalisés sur des enfants de moins de trois ans. Or, il les facturait pour des enfants bien plus âgés."
Le tribunal note également que le chiffre d'affaires du praticien a triplé entre 2016 et 2019, atteignant près de 500.000 euros annuels. Lui prétend que cette augmentation est due à des tests auditifs et ophtalmologiques accrus ainsi qu'à un rythme de consultations soutenu, de quatre à six par heure. Une version mise en doute par les patients interrogés, qui affirment que le médecin ne leur expliquait pas les actes effectués.
Le parquet a requis quatre ans de prison avec sursis, une interdiction définitive d'exercer, la confiscation de ses biens (deux maisons, des comptes bancaires et professionnels) et une amende de 150.000 euros. La défense, elle, plaide la relaxe ou, à défaut, des sanctions plus clémentes.
Le verdict sera rendu le 2 avril prochain.
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